Décision de la Commission des sanctions du 9 juillet 2015 à l'égard de la société cabinet de conseil Hérios Finance et de M. A

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
AMF, 9 juill. 2015, n° SAN-2015-14
Numéro : SAN-2015-14
Identifiant AMF : SAN-2015-14

Texte intégral

La Commission des sanctions

DÉCISION DE LA COMMISSION DES SANCTIONS À L’ÉGARD DE LA SOCIÉTÉ CABINET DE CONSEIL HERIOS FINANCE ET DE M. A

La 1ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après : « AMF ») :

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 211-1, L. 321-1, L. 541-1, L. 541-8-1, L. 621-2, L. 621-9, L. 621-15, L. 621-17, D. 211-1 A, D. 321-1, R. 621-38 à R. 621-39-4 et R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 143-3, 314-43, 325-5 et 325-12-3 ;

Vu les notifications de griefs adressées le 16 juin 2014 à la société à responsabilité limitée Cabinet de Conseil Herios Finance (ci-après : « Herios »), ainsi qu’à son gérant, M. A ;

Vu la lettre du président de l’AMF en date du 16 juin 2014 transmettant au président de la Commission des sanctions, en application de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, copie des notifications de griefs adressées le 16 juin 2014 à la société Herios, ainsi qu’à M. A ;

Vu la décision du président de la Commission des sanctions du 27 juin 2014 désignant M. Miriasi Thouch, membre de la Commission, en qualité de rapporteur ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 4 juillet 2014 informant la société Herios et M. A, de la nomination de M. Miriasi Thouch en qualité de rapporteur et leur rappelant la faculté d’être entendus, à leur demande, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 7 juillet 2014 informant la société Herios et M. A de la faculté qui leur était offerte de demander la récusation du rapporteur dans le délai d’un mois ;

Vu les observations en réponse aux notifications de griefs du 31 juillet 2014 par la société Herios et M. A ;

Vu les procès-verbaux des auditions de la société Herios et de M. A, en date du 24 avril 2015 ;

Vu les pièces complémentaires transmises par les mis en cause par courriel du 27 avril 2015 ;

Vu le rapport de M. Miriasi Thouch en date du 4 mai 2015 ;

Vu les lettres du 5 mai 2015 signifiées par exploit d’huissier, convoquant la société Herios et M. A à la séance de la Commission des sanctions du 5 juin 2015, auxquelles était joint le rapport du rapporteur, informant les mis en cause du délai de quinze jours dont ils disposaient pour présenter des observations en réponse,

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conformément aux dispositions du III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier, ainsi que de leur droit à se faire assister de tout conseil de leur choix, selon les dispositions du II de l’article R. 621-40 du code monétaire et financier, et les informant de la composition de la formation de la Commission des sanctions lors de la séance, ainsi que du délai de quinze jours dont ils disposaient pour demander la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres, en application des articles R. 621-39-2, R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du code monétaire et financier ;

Vu la lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 11 mai 2015, convoquant à la séance de la Commission des sanctions du 5 juin 2015 la Selarl MDP Mandataires Judiciaires Associés, en charge de la liquidation judiciaire de la société Herios, prise en les personnes de Mes Patrick-Paul Dubois et Marie Dubois Perotti, mandataires judiciaires ;

Vu les observations écrites en réponse au rapport du rapporteur adressées par Mes Emilie Colly Chenard et Antoine Larcena pour le compte de M. A le 28 mai 2015, après une demande de prorogation du délai de réponse, accordée par le président de la Commission des sanctions ;

Vu les documents adressés le 4 juin 2015 par Me Aurélien Barrié, conseil de la Selarl MDP Mandataires Judiciaires Associés ;

Vu les observations complémentaires de Me Antoine Larcena du 4 juin 2015, pour le compte de M. A, remises lors de la séance publique du 5 juin 2015 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 5 juin 2015 :

— M. Miriasi Thouch, en son rapport ;

— M. Benoît Catzaras, représentant le Directeur général du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

— M. Xavier Jalain, représentant le Collège de l’AMF ;

— M. A, tant en son nom personnel qu’en sa qualité de gérant de la société Herios ;

— Me Antoine Larcena, conseil de M. A ;

Les personnes mises en cause ayant eu la parole en dernier.

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FAITS ET PROCÉDURE

La société Herios, dont le capital social était détenu à parité par son gérant, M. A et par son épouse, est un cabinet de conseil en investissements financiers (ci-après : « CIF »), enregistré depuis le 13 juillet 2008, et adhérent auprès de l’association ANACOFI-CIF. La société possède par ailleurs le statut de démarcheur financier et d’intermédiaire en assurance.

Le tribunal de commerce de Lyon a, par jugement du 6 mars 2014 placé la société Herios en redressement judiciaire, qui a été converti en liquidation judiciaire par le même tribunal par jugement du 17 décembre 2014.

A l’époque des faits, la société Herios exerçait trois types d’activités : une activité d’agent immobilier qui représentait environ 90% du chiffre d’affaires réalisé au titre des exercices 2011 et 2012, une activité liée à des produits d’assurance représentant environ 7% et une activité de CIF représentant une part résiduelle de 3%.

Le 8 janvier 2013, en application de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, le secrétaire général de l’AMF a décidé de procéder « au contrôle du respect par le conseiller en investissements financiers Herios (…) de ses obligations professionnelles ».

La mission de contrôle, réalisée sur place et sur pièces par la Direction des enquêtes et des contrôles de l’AMF (ci- après : « DEC »), a donné lieu à l’établissement d’un rapport le 5 novembre 2013.

Le 15 novembre 2013, le secrétaire général de l’AMF a adressé le rapport de contrôle à la société Herios, prise en la personne de son gérant M. A, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, en lui indiquant qu’elle disposait du délai d’un mois pour formuler ses observations éventuelles.

Par courriel du 18 décembre 2013, la société Herios a sollicité la prorogation du délai dont elle disposait pour présenter ses observations, qui ont été déposées, après accord de l’AMF, le 6 janvier 2014.

Après examen du rapport de contrôle et des observations en réponse de la société, la Commission spécialisée n° 2 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, a décidé le 11 avril 2014, de notifier à Herios, ainsi qu’à M. A, plusieurs griefs relatifs au non-respect de leurs obligations professionnelles.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 16 juin 2014, le Président de l’AMF a notifié à la société Herios ainsi qu’à M. A les griefs qui leur étaient reprochés.

En substance, il est fait grief à la société Herios d’avoir conseillé à ses clients de confier leurs fonds à la société de droit Seychellois X afin que cette dernière les investisse « sur le marché des futures, en particulier sur le marché du Forex » en contrepartie d’un rendement annoncé de 36% annuel et d’un engagement de ne faire supporter au client aucune perte en capital en souscrivant un « produit X » et ce :

— sans avoir procédé aux vérifications élémentaires qui auraient permis d’apprécier le caractère réel et sérieux des caractéristiques des placements proposés par la société seychelloise, ainsi que leur niveau de risque, avant de les conseiller à des clients, en violation de l’obligation « d’agir avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent » prévue à l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier ;

— sans mentionner le risque de perte en capital que présentait le « produit X » ou les indices permettant aux clients d’Herios de juger du risque que faisait courir ce placement, en violation des dispositions de l’article 325-5 du règlement général de l’AMF aux termes duquel « les informations, y compris à caractère promotionnel, adressées par un conseiller en investissements financiers, présentent un caractère exact, clair et non trompeur ».

Aux termes des notifications, les griefs seraient également imputables à M. A pris en sa qualité de gérant d’Herios, en application des dispositions de l’article 325-12-3 du règlement général de l’AMF qui énonce que « lorsque le conseiller en investissements financiers est une personne morale, les personnes

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physiques ayant le pouvoir de gérer ou d’administrer ladite personne morale s’assurent qu’elle se conforme aux lois, règlements et obligations professionnelles la concernant ».

Les notifications de griefs précisent que si ces faits étaient avérés, ils pourraient donner lieu au prononcé d’une sanction à l’encontre de la société Herios, sur le fondement de l’article L. 621-17 du code monétaire et financier.

Le 16 juin 2014, conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, le président de l’AMF a transmis la copie des notifications de griefs au président de la Commission des sanctions qui, par décision du 27 juin 2014, a désigné M. Miriasi Thouch en qualité de rapporteur, ce dont la société mise en cause et M. A ont été informés par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 4 juillet 2014, leur rappelant la faculté d’être entendus, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 7 juillet 2014, les mis en cause ont également été informés qu’ils disposaient du délai d’un mois pour demander, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, la récusation du rapporteur, dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 31 juillet 2014, la société Herios et M. A ont transmis des observations communes en réponse aux notifications de griefs.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 9 octobre 2014, la société Herios a avisé le rapporteur qu’elle était placée en liquidation judiciaire, par jugement du tribunal de commerce de Lyon prononçant la conversion de la procédure de redressement judiciaire du 6 mars 2014 en liquidation judiciaire.

Le rapporteur a procédé aux auditions des mis en cause le 24 avril 2015, après qu’une première date ait été repoussée à leur demande. Lors de ces auditions, le rapporteur a formulé des demandes de communication de pièces complémentaires, qui lui ont été transmises par les mis en cause par courriel du 27 avril 2015.

La société Herios et M. A ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions et informés de la composition de la Commission des sanctions lors de la séance par lettres du 5 mai 2015 remises par exploit d’huissier le même jour. Ces lettres mentionnaient le délai de quinze jours dont les mis en cause disposaient pour demander la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres, en application des articles R. 621-39-2 à R. 621-39- 4 du code monétaire et financier, la faculté de se faire assister des conseils de leur choix, conformément au II de l’article R. 621-40 du code monétaire et financier, ainsi que le délai de quinze jours dont ils disposaient en application du III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier pour présenter leurs observations en réponse au rapport du rapporteur qui était joint à ces lettres.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 28 mai 2015, Mes Emilie Colly Chenard et Antoine Larcena, ont transmis des observations écrites pour le compte de M. A en réponse au rapport du rapporteur.

Par courriel du 4 juin 2015, Me Aurélien Barrié a transmis pour le compte de Me Dubois, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Herios, des éléments relatifs au passif déclaré.

Au cours de la séance publique du 5 juin 2015 de la Commission des sanctions, Me Antoine Larcena a remis des observations complémentaires pour le compte de M. A.

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MOTIFS DE LA DECISION

I. SUR LES MOYENS DE PROCEDURE

I.1 Sur la compétence de la Commission des sanctions

Considérant qu’en réponse au rapport du rapporteur, M. A soulève l’incompétence de la Commission des sanctions en relevant que le « service X » ne porterait pas sur des instruments financiers et qu’il ne constituerait pas un service d’investissement de gestion de portefeuille pour compte de tiers ;

Considérant que l’article L. 541-1 du code monétaire et financier dans sa version en vigueur depuis le 24 octobre 2010 énonce que : « I Les conseillers en investissement financiers sont les personnes exerçant à titre de profession habituelle les activités suivantes : / 1° Le conseil en investissement mentionné au 5 de l’article L. 321- 1 ; 2° (Abrogé) ; 3° Le conseil portant sur la fourniture de services d’investissement mentionnés à l’article L. 321- 1 ; 4° Le conseil portant sur la réalisation d’opérations sur biens divers définis à l’article L. 550-1 / II Les conseillers en investissements financiers peuvent également fournir le service de réception et de transmission d’ordres pour le compte de tiers, dans les conditions et limites fixées par le règlement général de l’AMF et exercer d’autres activités de conseil en gestion de patrimoine (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 321-1 du code monétaire et financier en vigueur depuis le 1er novembre 2007, « les services d’investissement portent sur les instruments financiers énumérés à l’article L. 211-1 et comprennent les services et activités suivants (…) 4. La gestion de portefeuille pour le compte de tiers ; 5. Le conseil en investissement (…). / Un décret précise la définition de ces services » ; que l’article D. 321-1 dans sa version issue du décret du 15 mai 2007 non modifié sur ce point précise que « Les services d’investissement mentionnés à l’article L. 321-1 sont définis comme suit : (…) 4. Constitue le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers le fait de gérer, de façon discrétionnaire et individualisée, des portefeuilles incluant un ou plusieurs instruments financiers dans le cadre d’un mandat donné par un tiers ; / 5. Constitue le service de conseil en investissement le fait de fournir des recommandations personnalisées à un tiers, soit à sa demande, soit à l’initiative de l’entreprise qui fournit le conseil, concernant une ou plusieurs transactions portant sur des instruments financiers. Le règlement général de l’Autorité des marchés financiers précise la notion de recommandation personnalisée au sens de la présente disposition » ;

Considérant par ailleurs que l’article L. 211-1 du code monétaire et financier, dans sa version issue de l’ordonnance du 8 janvier 2009 prévoit que « I. Les instruments financiers sont les titres financiers et les contrats financiers. / II. Les titres financiers sont : / 1. Les titres de capital émis par les sociétés par actions ; / 2. Les titres de créance, à l’exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ; / 3. Les parts ou actions d’organismes de placement collectif. / III. Les contrats financiers, également dénommés « instruments financiers à terme », sont les contrats à terme qui figurent sur une liste fixée par décret » ; que l’article D. 211-1 A du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du décret du 16 mars 2009 énonce : « I. – Les contrats financiers mentionnés au III de l’article L. 211-1 sont : 1. Les contrats d’option, contrats à terme fermes, contrats d’échange, accords de taux futurs et tous autres contrats à terme relatifs à des instruments financiers, des devises, des taux d’intérêt, des rendements, des indices financiers ou des mesures financières qui peuvent être réglés par une livraison physique ou en espèces ; / (…) 6. Les contrats financiers avec paiement d’un différentiel (…) 8. Tout autre contrat à terme concernant des actifs, des droits, des obligations, des indices et des mesures, non mentionné par ailleurs aux 1 à 7 ci-dessus, qui présente les caractéristiques d’autres instruments financiers à terme, en tenant compte de ce que, notamment, il est négocié sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation, est compensé et réglé par l’intermédiaire d’une chambre de compensation reconnue ou fait l’objet d’appels de couvertures périodiques » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 621-17 du code monétaire et financier « Tout manquement par les conseillers en investissements financiers définis à l’article L. 541-1 aux lois, règlements et obligations professionnelles les concernant est passible des sanctions prononcées par la commission des sanctions selon

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les modalités prévues aux I, a et b du III, IV et V de l’article L. 621-15 » ; qu’ainsi la Commission des sanctions est compétente pour prononcer des sanctions à l’égard des conseillers en investissements financiers au titre des activités relevant de leur statut professionnel ;

Considérant en l’espèce qu’aux termes de la convention du 29 août 2012 intitulée « convention d’apporteur d’affaires » la société d’investissement X exerçant principalement sur le marché du Forex et des indices confiait à Herios le droit de commercialiser les produits et services appartenant à X ; qu’en contrepartie des clients apportés, Herios devait percevoir une commission d’entrée d’un montant de 0,5% des fonds apportés, une commission mensuelle sur le portefeuille et une prime mensuelle de seuil de 3 500 dollars lorsque le montant du portefeuille de l’apporteur d’affaires était supérieur à 500 000 euros et de 5 000 dollars lorsque le montant du portefeuille dépassait 1 million d’euros ;

Considérant qu’il résulte des éléments du dossier que le « produit X » commercialisé par Herios était présenté comme offrant aux clients, en contrepartie du virement de leurs fonds sur un « compte global séquestré et insaisissable », une rémunération mensuelle de 3% et la garantie de ne subir aucune perte en capital ; que les fonds déposés n’avaient donc pas vocation à être directement investis, mais devaient permettre à la société X d’augmenter son exposition sur les marchés sur lesquels elle intervenait ; qu’un compte administratif de suivi des performances intitulé « FW300 » permettait aux clients de visualiser un montant d’intérêts libellés en dollars calculé quotidiennement ;

Considérant qu’Herios faisait signer à ses clients des conventions aux termes desquelles ceux-ci confiaient un capital à X qui était présenté comme intervenant sur les marchés financiers de futures, de devises et d’indices sectoriels ; que X s’engageait à sécuriser la totalité du capital investi auprès d’un ou plusieurs « Custodians » [dépositaire], était débitrice d’une « obligation de résultat garanti fixe » devant « assurer un rendement mensuel de 3% pour l’investisseur » et se présentait comme un gérant devant agir dans l’intérêt exclusif du mandant ;

Considérant qu’une lettre de mission était également signée sur papier à entête de la société Herios entre le client et la société Herios ou l’un de ses « conseillers » détaillant la nature de la mission principale, les objectifs du client et le déroulement de la mission ; que la lettre de mission indiquait que le cabinet élaborait une étude personnalisée répondant aux objectifs du client et « recherchait pour [lui] le produit le mieux adapté à sa situation auprès des sociétés partenaires du cabinet » ; qu’elle mentionnait également « compte tenu de la demande particulière du client » les dispositions de l’article 211-3 du règlement général de l’AMF relatives aux placements privés, fixaient les honoraires du cabinet à un montant pouvant aller jusqu’à la totalité de la performance excédant 1,5% par mois et mentionnait que le client reconnaissait avoir reçu « la fiche d’information CIF comprenant les informations techniques et légales sur le conseiller et son entreprise » ;

Considérant que la société Herios est enregistrée en tant que conseiller en investissements financiers depuis le 13 juillet 2008 et adhérente auprès de l’association ANACOFI-CIF ; qu’elle s’est présentée à ses clients en cette qualité lors des conseils qu’elle leur a prodigués dans leurs investissements auprès de la société X ; qu’aux termes des conventions signées avec ses clients, Herios s’engageait à respecter les obligations professionnelles applicables aux conseillers en investissements financiers ; qu’enfin elle a déclaré tant durant la procédure de contrôle que pendant la phase d’instruction avoir agi en qualité de conseiller en investissements financiers ;

Considérant par ailleurs que dans le cadre des conseils qu’elle a prodigués à ses clients de confier des fonds à la société X, Herios a analysé le patrimoine de ses clients, déterminé leurs attentes afin de proposer une stratégie d’investissement, avant de la mettre en place en sélectionnant un support d’investissement et en assurant le suivi de cet investissement ; qu’Herios a ainsi exercé certaines des « autres activités de conseil en gestion de patrimoine » entrant dans les prévisions de l’article L. 541-1 du code monétaire et financier précité au titre des activités et services relevant du statut de conseiller en investissements financiers ;

Considérant que si les dispositions du 4° de l’article L. 541-8-1 prévoient certaines obligations spécifiques de bonne conduite circonscrites aux seules activités relevant du I de l’article L. 541-1 du code monétaire et financier, les autres obligations prévues à l’article L. 541-8-1, et notamment celles de se comporter avec loyauté et d’agir avec équité aux mieux des intérêts de leurs clients, s’appliquent à toutes les activités visées à l’article L. 541-1 du code monétaire et financier exercées par les conseillers en investissements financiers, en ce compris celles relevant du II de l’article L. 541-1 au nombre desquelles figurent les « autres activités de conseil en gestion de patrimoine » ;

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Considérant que, dès lors, sous réserve des pouvoirs de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sur les activités relevant exclusivement de sa compétence, la Commission des sanctions de l’AMF est compétente, en application des dispositions de l’article L. 621-17 du code monétaire et financier, pour prononcer une sanction à l’encontre d’un conseiller en investissements financiers en cas de manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles à l’occasion d’une activité relevant du II de l’article L. 541-1 du code monétaire et financier ; que l’exception d’incompétence soulevée par les mis en cause sera écartée ;

I.2 Sur les conséquences d’une procédure pénale en cours

Considérant que dans ses observations en réponse au rapport du rapporteur puis en séance, M. A a sollicité que la Commission des sanctions « retarde le prononcé [d’une] hypothétique sanction à la clôture de la procédure pénale en cours pour les mêmes faits » ;

Mais considérant que la procédure pénale dont il fait état ne peut avoir d’incidence sur la présente procédure ; que par suite, la demande susmentionnée ne peut être accueillie ;

II. SUR LES GRIEFS

II.1 Sur le grief tiré de l’insuffisance des vérifications faites par Herios Finance sur le produit financier proposé par X, dans le cadre des conseils en investissement prodigués à ses clients

Considérant qu’il est reproché à la société Herios Finance et à son dirigeant des insuffisances en matière de vérification réalisées sur le produit financier proposé par X, tant en amont de la fourniture des conseils prodigués à ses clients qu’après cette fourniture, en violation des dispositions de l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier aux termes duquel : « Les conseillers en investissements financiers doivent : / 1° Se comporter avec loyauté et agir avec équité au mieux des intérêts de leur clients ; / 2° Exercer leur activité, dans les limites autorisées par leur statut, avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent au mieux des intérêts de leurs clients, afin de leur proposer une offre de services adaptée et proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs ; / 3° Etre dotés des ressources et procédures nécessaires pour mener à bien leurs activités et mettre en œuvre ces ressources et procédures avec un souci d’efficacité (…) » ;

Considérant qu’ainsi que le relèvent les notifications de griefs, le placement proposé présentait des caractéristiques contradictoires assurant tout à la fois une rentabilité très importante de plus de 36% par an et la garantie pour le souscripteur de ne subir aucune perte en capital ; qu’une telle offre de placement était par ailleurs proposée par une entité domiciliée aux Seychelles ne disposant d’aucun agrément pour fournir un service d’investissement en France ; qu’en outre l’identité du teneur de compte-conservateur visée dans la convention entre X et Herios différait de celle mentionnée dans les conventions intervenant entre X et les clients d’Herios que ce dernier leur faisait signer ; que les fonds des clients n’étaient pas conservés sur des comptes individuels et nominatifs ; qu’à cet égard, les notifications de griefs relèvent que les clients ne disposaient d’aucun relevé de compte établi par un établissement de crédit ou un teneur de compte-conservateur mais d’un simple tableau – le compte « FW300 » – faisant apparaître le montant des intérêts quotidiens sans que ne figurent le capital investi, les modalités de calcul de la performance ou le caractère créditeur ou débiteur des mouvements ;

Considérant que si la société Herios a vérifié les agréments des intermédiaires financiers impliqués dans le produit proposé par la société X au titre de leur activité de compensateur, teneur de compte-conservateur ou courtier, et obtenu des éléments sur l’existence de relations contractuelles, les éléments obtenus n’étaient de nature à attester ni la réalité des caractéristiques du produit présenté, ni la capacité de X d’honorer les promesses faites aux clients d’Herios en matière de sécurisation des fonds déposés ou de rendement ; qu’à cet égard Herios ne saurait utilement invoquer le refus opposé par X de lui communiquer des éléments financiers pertinents dès lors qu’elle s’est abstenue de tirer les conséquences d’un tel refus ; que, de la même manière, Herios n’a tiré aucune conséquence du fait que l’attestation transmise par le teneur de compte-conservateur de la société X faisait état de ce que les fonds remis par les clients de la société X appartenaient à cette dernière qui pouvait en disposer pour réaliser des transactions, ce qui était en contradiction avec la présentation du produit par X qui prétendait que la sécurisation des fonds des clients était garantie par leur conservation sur un compte indépendant de son compte de trading ;

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Considérant qu’Herios ne peut valablement tenter d’exonérer sa responsabilité en invoquant l’existence d’une demande d’information auprès de l’AMF portant sur l’un des intermédiaires financiers utilisés par la société X dans le produit proposé aux clients de la société Herios, pas plus qu’en excipant d’un avis général émis par l’association ANACOFI-CIF sur le caractère régulier du produit proposé par la société X, dès lors que ces demandes ou avis ne sauraient dispenser le conseiller de l’accomplissement de ses propres diligences et qui ont au demeurant été rendus sur la base des informations transmises par la société Herios, qui ne figurent pas au dossier de procédure ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’Herios n’a pas effectué les diligences qui lui auraient permis de vérifier la réalité et le niveau de risque des investissements proposés par la société X avant de conseiller son produit à ses clients ; que dès lors en proposant ce produit sans procéder aux vérifications minimales qui s’imposaient, et sans se doter d’outils permettant de renseigner les clients sur l’évolution concrète de leurs investissements, Herios Finance a manqué vis-à-vis de ses clients à ses obligations professionnelles, mentionnées à l’article L. 541-8-1 du code monétaire et financier relatives au fait d’agir « avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent au mieux des intérêts de leurs clients, afin de leur proposer une offre de services adaptée et proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs » et d’être doté « des ressources et procédures nécessaires pour mener à bien leurs activités et mettre en œuvre ces ressources et procédures avec un souci d’efficacité » ;

Considérant au demeurant qu’à l’époque à laquelle le produit de la société X était conseillé par la société Herios à ses clients, l’AMF émettait des communiqués à destination du public, destinés à lui rappeler que les espoirs de gains en matière de placements financiers étaient proportionnels aux risques de perte encourus, et le mettant précisément en garde contre les placements effectués sur le marché du Forex ;

II.2 Sur le grief tiré de l’absence de communication à ses clients par Herios Finance d’une information exacte, claire et non trompeuse

Considérant que les notifications de griefs relèvent qu’en ne mentionnant pas le risque de perte en capital que présentait le produit proposé par la société X, ou à tout le moins les indices relevés à l’appui du précédent grief, la société Herios Finance n’aurait pas fourni à ses clients une information conforme à l’article 325-5 du règlement général de l’AMF aux termes duquel : « Toutes les informations, y compris à caractère promotionnel, adressées par un conseiller en investissements financiers, présentent un caractère exact, clair et non trompeur » ;

Considérant que compte tenu des différentes constatations relevées dans l’étude du premier grief, en omettant d’informer ses clients du caractère difficilement conciliable des caractéristiques supposées du produit conciliant une garantie du capital des clients et un rendement annuel garanti de plus de 36%, Herios a manqué à son obligation professionnelle de fournir à ses clients une information claire, exacte et non trompeuse, telle que visée à l’article 325-5 du règlement général de l’AMF ;

III. SUR LES SANCTIONS ET LA PUBLICATION

Considérant que l’article L. 621-17 du code monétaire et financier, dans sa version issue de la loi du 1er août 2003 non modifiée sur ce point, dispose : « Tout manquement par les conseillers en investissements financiers définis à l’article L. 541-1 aux lois, règlements et obligations professionnelles les concernant est passible des sanctions prononcées par la commission des sanctions selon les modalités prévues aux I, a et b du III, IV et V de l’article L. 621-15 / Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements » ; qu’aux termes du III de l’article L. 621-15 du même code, dans sa rédaction en vigueur du 24 octobre 2010 au 28 juillet 2013 non modifiée depuis lors dans un sens moins sévère, « III.- Les sanctions applicables sont : / a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°,11°,12°,15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public » ; que le b du III de l’article L. 621-15 précise quant à lui que « Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie de ses activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions

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une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 15 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c à g du II ou à 300 000 € ou au quintuple des profits éventuellement réalisés dans les autres cas (…) » ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la Commission des sanctions peut prononcer des sanctions à raison de leurs manquements à leurs obligations professionnelles, tant à l’encontre des conseillers en investissements financiers, personnes physiques ou personnes morales, qu’à l’égard des personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de ces dernières et ce sans qu’il soit besoin pour elle de se fonder dans le présent dossier sur les dispositions de l’article 325-12-3 du règlement général de l’AMF introduit par l’arrêté du 12 avril 2013 aux termes duquel « lorsque le conseiller en investissements financiers est une personne morale, les personnes physiques ayant le pouvoir de gérer ou d’administrer ladite personne morale s’assurent qu’elle se conforme aux lois, règlements et obligations professionnelles la concernant »;

Considérant que les manquements caractérisés qui sont au premier chef imputables à la société Herios sont également imputables à M. A en sa qualité de gérant d’Herios ;

Considérant qu’aux termes des notifications de griefs, Herios a permis à X de recueillir plus de

5 millions d’euros auprès de 80 clients entre le 30 octobre 2012 et le 31 mai 2013 et que les investigations effectuées par la mission de contrôle ont porté plus particulièrement sur un échantillon de 17 clients ayant investi dans le « produit X » entre le 30 octobre 2012 et le 14 février 2013 un montant total de 1 342 000 euros ; qu’il sera fait une exacte application des circonstances de la cause en prononçant une sanction pécuniaire de 30 000 euros à l’encontre de la société Herios, placée en liquidation judiciaire, et en prononçant à l’encontre de son gérant, M. A, une interdiction d’exercer l’activité de conseiller en investissement financier pour une durée de trois ans ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 621-15, V, du code monétaire et financier, « la décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. Toutefois, lorsque la publication risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause, la décision de la commission peut prévoir qu’elle ne sera pas publiée » ;

Considérant que la publication de la présente décision ne risque ni de perturber gravement les marchés financiers, ni de causer un préjudice disproportionné aux mis en cause ; qu’elle sera donc ordonnée ;

PAR CES MOTIFS,

Et après en avoir délibéré sous la présidence de M. Michel Pinault, par Mmes France Drummond et Patricia Lazard Kodyra, et MM. Christophe Soulard et Bruno Gizard, membres de la 1ère Section de la Commission des sanctions, en présence de la secrétaire de séance,

DECIDE DE :

— prononcer à l’encontre de la société Herios une sanction pécuniaire de 30 000 € (trente mille euros) ;

— prononcer à l’encontre de M. A une interdiction d’exercer l’activité de conseiller en investissements financiers pendant une durée de trois ans ;

— publier la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers.

Fait à Paris, le 9 juillet 2015,

La Secrétaire de séance

Le Président

Anne Vauthier Michel Pinault

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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  • Considérant qu’aux termes de l’article L. 621-15, V, du code monétaire et financier, « la décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute c…

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Textes cités dans la décision

  1. Code monétaire et financier
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Décision de la Commission des sanctions du 9 juillet 2015 à l'égard de la société cabinet de conseil Hérios Finance et de M. A